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Les avis du CSE, des avis pour rien ?

Edito Michel Lemaire, Élu FO Matmut et Trésorier du CSE
Mots clé :

Le CSE, une instance pertinente ?

Comment agir sur les choix de l’entreprise dans l’intérêt des salariés ? Comment protéger les collègues ? Voici les premières questions que je me suis posé en m’engageant syndicalement.

J’ai pu voir à la Matmut que les choix de l’entreprise sont dictés par l’économie. La santé des salariés est souvent oubliée. Alors, comment œuvrer pour les collègues lors d’un projet impactant soit leur avenir, soit leur santé ou leurs conditions de travail ?

Parmi la palette d’action dont disposent les représentants du personnel, il y a l’avis du CSE, du moins, lorsque la Direction de l’entreprise ne fait pas l’impasse sur la consultation du CSE…

Lorsque le CSE est consulté sur un projet, il a la lourde tâche d’anticiper les effets de ce projet sur l’emploi et les conditions de travail.

Mais soyons honnête, sauf quelques exceptions, le CSE ne peut pas bloquer (sauf par la voie judiciaire) le projet de l’entreprise. Il n’a pas de droit de veto. À la différence de l’Allemagne où les syndicats ont un pouvoir de codécision, en France, le CSE n’a qu’un rôle consultatif. Sauf exception, le vote défavorable ne peut bloquer un projet, sauf si l’employeur écoute le CSE. Ce qui n’arrive jamais…

Un rôle amoindri au fil du temps.

Les différentes réformes successives ont profondément impacté les consultations du CSE. Le nombre de consultations obligatoires a également été réduit. La loi Rebsamen du 17 août 2015 a réduit de 17 à 3 le nombre de consultations depuis le 1er janvier 2016. Les employeurs apprécient, les syndicats beaucoup moins, car au bout du bout, les salariés sont les victimes du recul des droits du CSE.

Les réformes sur la législation du travail ont modifié la manière dont les consultations du CSE sont menées. Autrefois, les consultations se prolongeaient jusqu’à ce que le comité d’entreprise ait reçu toutes les informations nécessaires pour formuler son avis, sans limite de temps. Mais la pression du patronat sur les gouvernements successifs, ont permis l’introduction de délais fixes. L’employeur peut donc ne pas communiquer l’intégralité des documents et le CSE doit rendre son avis puisque des délais sont imposés. L’absence d’avis dans le délai fixé sera considérée comme un avis négatif sans que le CSE ne puisse se prononcer (article L 2312-15 al. 5 du code du Travail).

Un avis du CSE pourtant essentiel pour le salarié…

Lorsque le CSE est consulté par l’employeur sur un projet d’entreprise, l’unique mission du CSE, par l’intermédiaire de ses représentants, est de représenter et défendre les intérêts des salariés.

Les employeurs tentent de plus en plus à ce que l’expression de l’avis du CSE se réduise à un vote “favorable” ou “défavorable” à la question posée. Celà lui évite de devoir répondre aux questions ou observations du CSE, ce qui n’est pas le cas lorsque l’avis du CSE est motivé et argumenté.

Dans l’intérêt des salariés, le CSE ne doit pas tomber dans ce piège.

Lorsque l’avis est motivé et argumenté, les salariés de l’entreprise peuvent prendre connaissance de l’enjeu du projet, des éventuels risques pour l’emploi et les conditions de travail. C’est par l’avis motivé que les salariés se rendent compte de l’importance de la mission des représentants du personnel et peuvent ainsi constater que le CSE n’est pas qu’une chambre d’enregistrement.

…notamment en cas de maladie professionnelle consécutive au projet.

Le procès-verbal adopté par le CSE a une valeur juridique et représente un moyen de preuve pour le CSE et le salarié qui peut être victime du projet de l’employeur. C’est pourquoi, comme nous l’avons vu précédemment, il est primordial que le CSE rende un avis argumenté, analysant les risques pour les salariés

En effet, dans l’intérêt des salariés, le CSE doit mettre en exergue les problèmes que le projet présente en matière économique ou en matière d’organisation du travail, de santé, de sécurité et de conditions de travail.

Si après avoir alerté l’employeur des risques pour la santé des salariés, l’employeur maintient son projet en l’état et que le risque se réalise, l’employeur verra sa responsabilité engagée sur le fondement de la faute inexcusable. L’employeur ne peut invoquer la méconnaissance du risque puisqu’il aura été alerté par le CSE.

Un avis permettant d’alerter des tiers.

L’avis en matière économique.

Lorsque le CSE rend un avis sur les orientations stratégiques de l’entreprise, l’avis est, au terme de l’article L 2312-24 du Code du travail, « transmis à l’organe chargé de l’administration ou de la surveillance de l’entreprise [le CA, le comité de direction ou toute autre composante], qui formule une réponse argumentée. Le comité [le CSE] en reçoit communication et peut y répondre. »

Nous le voyons, cet avis est important car un échange peut s’engager avec la Direction. Le CSE ne doit pas hésiter à se faire accompagner par un expert pour étudier les pièces et rendre un avis argumenté. Il doit veiller à ce que l’avis soit réellement transmis au bon interlocuteur et exiger les réponses à ses questions.

En dehors des cas prévus par le législateur, le CSE peut tout à fait décider de transmettre son avis à l’organe dirigeant, mais celui-ci ne sera pas contraint de lui répondre.

L’avis transmis à l’inspection du travail.

Dans un certain nombre de situations, l’avis du CSE sera transmis à l’inspection du travail. Ce sera notamment le cas dans le cadre des projets de restructuration et de compression des effectifs, impliquant, notamment, un plan de sauvegarde de l’emploi (article L 2312-39 du code du Travail).

Un avis motivé et argumenté est important puisqu’à la lecture de cet avis, l’inspection du travail prend connaissance des problèmes et peut décider d’intervenir en entreprise.

Une obligation de réponse de l’employeur.

Tout comme pour les orientations stratégiques, lorsque le CSE rend un avis, l’employeur doit répondre (articles L 2312-15 et L 2315-34 du Code du Travail).

Bien trop souvent, l’employeur ne répond pas à l’avis du CSE et ce dernier, malheureusement pour les salariés, n’assure pas le suivi de ses avis et passe à autre chose.

Pourtant, assurer un suivi et obtenir la réponse de l’employeur est important puisque le CSE pourra constater ou non si l’employeur a tenu compte des recommandations et prendre les mesures nécessaires en cas du contraire.

Assurer un suivi des avis permet au CSE de s’assurer que le projet déployé est bien celui pour lequel il a été consulté, voir s’il y a des impacts non prévus au moment de la consultation et le cas échéant, demander à la Commission Santé, Sécurité et Conditions de Travail (CSSCT) d’étudier l’impact du projet sur la santé, la sécurité et les conditions de travail…

Qu’en est-il à la Matmut ?

A la Matmut, les droits du CSE sont souvent bafoués. Parfois, un mail argumenté juridiquement de FO Matmut suffit pour être consulté après un premier refus, parfois, il faut aller sur le terrain judiciaire.

FO Matmut a assigné une première fois la Matmut pour défaut de consultation (concernant la réorganisation des PGIS), le tribunal ayant contraint la Matmut à respecter son obligation de consultation. C’est d’ailleurs sur la base des résultats de l’expertise diligentée par le CSE, lors de la procédure d’information/consultation qui a suivi, que FO Matmut a, à nouveau, assigné la Matmut pour demander l’annulation du projet de réorganisation des PGIS.

Il a fallu, une fois encore pour FO Matmut, menacer d’un procès pour que la Direction accepte de consulter le CSE sur l’extension du test de prise en charge de la gestion des sinistres par les CDRS

Concernant les avis, la Direction de la Matmut les ignore et ne répond que très rarement aux avis du CSE, sauf lorsqu’un procès a lieu.

Un dispositif parfois sous exploité…

Avoir le droit pour les membres du CSE d’intervenir dans la vie de l’entreprise, c’est bien. User de ce droit, c’est mieux ! Malheureusement, force est de constater que parfois, à la Matmut, ce droit n’est pas toujours considéré à sa juste valeur, avec des avis favorables votés par une majorité d’élus alors que les éléments permettant de rendre un avis éclairé ne sont pas toujours connus du CSE, comme pour le dernier avis concernant les CDRS…

Je regrette par ailleurs, que seule FO Matmut s’obstine à faire respecter les prérogatives du CSE par la Direction et que les autres organisations syndicales n’y mettent pas autant d’ardeur.

…et clairement perfectible.

Nous l’avons vu, les avis du CSE sont essentiels pour le salarié. Tout comme les organisations patronales ont fait pression sur les gouvernements pour réduire l’importance des consultations, les organisations syndicales doivent revendiquer à ce qu’un avis négatif, fondé et argumenté du CSE, puisse bloquer le projet de l’entreprise lorsque celui-ci est néfaste pour les salariés.