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La polyvalence : un réel avantage pour le salarié ?

Edito Michel Lemaire, Élu au CSE et RSS FO Matmut

Des salariés polyvalents

Dans toutes les entreprises, il est demandé aux salariés d’être polyvalents. Le secteur de l’assurance n’y échappe pas.

En RH, il n’y a pas réellement de définition du salarié polyvalent. Le dictionnaire Robert définit le terme polyvalent ainsi « Qui a plusieurs fonctions, plusieurs activités différentes ». Le salarié polyvalent doit donc avoir plusieurs fonctions ou activités différentes.

Avec un beau papier cadeau, l’entreprise essaie de vendre les bienfaits de la polyvalence aux salariés. La main sur le cœur, les entreprises indiquent qu’il n’y a que des avantages.

D’une part, la polyvalence permettrait au salarié de relever de nouveaux défis en sortant de sa zone de confort. Bien entendu, le salarié viendrait au travail pour relever des défis et changer sa routine qui lui apporte une certaine sécurité.

Aux organisations syndicales, la polyvalence est vendue comme un gage de la sécurité de l’emploi et d’une meilleure employabilité. Comment ne pas être séduit ? Comment être contre, puisque le salarié restera employable dans l’entreprise puisqu’il fera un peu de tout ?

L’enterprise ne pense donc qu’aux salariés. Du moins, en apparence, car cela est vendeur.

Ce qui n’est pas dit, c’est que le monde change vite. Il y a rarement de visibilité des métiers au-delà de 5 ans. L’entreprise évolue en fonction de la demande du client et doit donc trouver un moyen de s’adapter rapidement au marché. De même, une entreprise doit faire face aux restructurations, aux réorganisations, aux absences d’un salarié (congé parental, maladie, attente de recrutement etc…).

Le principal objectif d’une entreprise, n’est pas le bien-être des salariés (même si l’entreprise fait beaucoup de communication sur le bien-être de ses « collaborateurs »), mais plutôt l’accroissement de sa productivité pour générer plus de bénéfices.

La polyvalence est une notion de gestion des ressources humaines cherchant l’optimisation des compétences transversales du salarié. La polyvalence permet d’accroître les performances de l’entreprise sans pour autant rehausser la masse salariale. Les frais liés au recrutement sont donc réduits.

C’est alors aux salariés qu’il revient d’être adaptables et flexibles. Être polyvalent, c’est élargir un peu ses compétences et accepter de devenir plus flexible (ou agile selon la novlangue managériale).

Est-ce réellement un bien pour le salarié ? Le salarié polyvalent ou généraliste, sait un peu de tout, mais rien à fond. Il fait de tout, mais de façon superficielle. Il suffit de regarder les formations que l’entreprise donne au salarié pour acquérir une nouvelle compétence : la formation ne doit pas dépasser plus d’une journée. Pourquoi ? Car au-delà, cela signifierait que la compétence visée nécessite une technicité fine et donc un employé spécialisé qui, lui, sait beaucoup de choses, mais dans un domaine spécifique bien précis, ce qui n’est pas le but recherché.

Si l’entreprise n’y prend pas garde, la polyvalence peut conduire à une déqualification des salariés, à une dégradation des services.

Et le salaire dans tout ça ?

Le salarié est-il mieux rémunéré lorsqu’il devient polyvalent ? Non. Il suffit de regarder les offres d’emplois avec les propositions de rémunération. Du point de vue de la politique salariale, les entreprises rémunèrent mieux l’expertise, la capacité du salarié à réaliser des activités complexes et exigeantes. Pourquoi ? Le salarié expert n’est pas interchangeable.

Un autre effet pervers de la polyvalence est que l’entreprise recrute des salariés avec un niveau de compétence moins élevé puisqu’il n’est plus demandé au salarié une expertise mais une maîtrise superficielle de divers sujets. Le salaire à l’embauche est donc moindre.

La polyvalence, c’est bon pour la santé ?

La polyvalence du salarié n’a rien d’idyllique. Les effets de la polyvalence sont :

Ces effets sont dénoncés depuis les années 70 quand Henry Mintzberg évoquait dans ses travaux, le « syndrome de la dispersion » qui atteint les salariés qui font plusieurs tâches à la fois et qui, in fine, se sentent fatigués, démoralisés et déboussolés. Le salarié polyvalent à l’impression de rester à la surface des choses, de ne pas avoir le temps de maîtriser à fond chacune des situations de travail, ni de développer des routines efficaces. Il y a donc une perte de sens du travail.

Concernant les risques psychosociaux, la polyvalence devrait être considérée comme un risque psychosocial puisque le salarié polyvalent doit effectuer une multitude de tâches de différents domaines, et cela crée une surcharge mentale au travail car il doit gérer un nombre important d’informations sollicitant fortement ses capacités cérébrales et cognitives, d’où son usure mentale.

La polyvalence permet donc une organisation low cost du travail ou les salariés font de tout avec peu de moyens, une formation au rabais et un salaire qui n’augmente pas.

Et à la Matmut ?

La Matmut n’échappe pas à la polyvalence des salariés. Cette entreprise cherche à faire des économies sur les frais généraux. La polyvalence des salariés permet d’atteindre cet objectif. Il est donc moins nécessaire de recruter.

Ainsi, des conseillers en assurance vont gérer des petits dégâts des eaux, les conseillers téléphoniques en assurance vont gérer des sinistres auto…

Les salariés des PGIS gère le début des déclarations des UGS corpo qui, eux-même, ont dû gérer des sinistres auto sous couvert de la qualité de service.

La Matmut ayant des difficultés à recruter à cause des bas salaires, la polyvalence permet à l’entreprise de répondre à ses obligations envers les assurés en étendant le champ des compétences des salariés de l’entreprise sans augmenter pour autant les salaires des salariés dont les compétences augmentent.

Pour acquérir ces nouvelles compétences, les formations se font au rabais, à distance et en peu de temps.

Depuis 2020, les salariés MPJ du siège ne sont plus spécialisés mais interviennent dans l’ensemble des domaines du droit. La Matmut succombe malheureusement à la polyvalence des salariés pour que ces derniers deviennent sur le long terme interchangeables.

Comment faire plus avec le même nombre de salariés ? La polyvalence est la solution.