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La promesse d’une promotion salariale : où comment l’entreprise réalise des économies sur le dos du salarié.

Edito Michel Lemaire, Élu FO Matmut et Trésorier du CSE
Mots clé :

Le « quiet-hiring »

Comment faire lorsqu’un poste se libère. Comment réussir à garder le salarié motivé alors que l’entreprise sait qu’elle ne va pas le faire évoluer ?

Pour concilier ces deux faits, l’entreprise a tendance, soit à donner les tâches à un salarié qui a une qualification moindre, soit à répartir les tâches entre plusieurs salariés.

Ce procédé n’est pas nouveau. Il nous vient tout droit des Etats-Unis d’Amérique et plus précisément de l’entreprise Google sous le nom de “quiet-hiring”.

De la fausse montée en compétence

Pour diverses raisons souvent d’ordre économique, il arrive, lorsqu’un salarié, par exemple N+1 quitte l’entreprise, que ce dernier ne soit pas remplacé.

Que faire de ses tâches ? Comment combler les besoins de l’entreprise à la suite de ce départ ?

L’entreprise va procéder à une répartition verticale et horizontale des tâches.

Prenons l’exemple d’un manager ayant quitté l’entreprise. Certaines tâches vont être confiées à d’autres managers et d’autres tâches vont être confiées aux non managers sous couvert de montée en compétence.

Les managers vont avoir tendance à accepter ces tâches supplémentaires car la Direction aura rappelé qu’ils sont aux forfaits.

Pour vendre les nouvelles tâches aux non managers, la Direction expliquera aux salariés que s’ils souhaitent accéder au poste de manager, ils doivent accepter ces nouvelles tâches et cela fait partie de la montée en compétence. L’entreprise ira même à dire que cela traduit de la confiance qu’à l’entreprise envers les salariés concernés.

Le salarié acceptera les nouvelles tâches dans l’espoir d’évoluer au sein de l’entreprise, mais également pour démontrer à l’entreprise qu’elle peut avoir confiance en lui. Il s’engagera donc au-delà de ses fonctions contractuelles.

Une économie pour l’entreprise

Pour l’entreprise, déléguer des tâches aux salariés ne relevant pas de sa qualification est une opération à zéro coût, voire même la réalisation d’une économie.

L’entreprise fait dans un premier temps une économie sur la masse salariale. Le salarié n’étant pas remplacé, il y a effectivement une économie sur les salaires. Le coût de fonctionnement de l’entreprise diminue.

Les salariés en font plus, sans que l’entreprise ne doive dépenser plus.

« Pas de reconnaissance des nouvelles tâches, salaire inchangé, hausse de la charge de travail et absence de formation sur le nouveau poste… Sous couvert de valorisation, le quiet hiring peut se retourner contre l’employé. Ce phénomène pose problème quand il est réalisé de manière opaque, qu’aucun mot n’est posé sur ce qui se passe et que les salariés sont mis devant le fait accompli », pointe Damien Richard, enseignant chercheur en RH, à l’INSEEC Lyon.

L’entreprise devient plus flexible, c’est-à-dire qu’elle adapte les ressources humaines aux différents aléas dans l’entreprise.

Une modification du contrat de travail

Lorsque le salarié est recruté, c’est pour un emploi précis. Le contrat de travail contient le poste du salarié. Une fiche de fonction y est rattachée.

Si la fiche de fonction n’est pas immuable. L’employeur peut donc la modifier mais il ne peut pas ajouter des tâches changeant la qualification du salarié sans procéder à un avenant au contrat de travail, puisque le travail en lui-même est un élément essentiel du contrat de travail. L’accord du salarié doit être exprès et doit-être matérialisé par écrit. La loi précise que l’acceptation d’une modification du contrat ne peut pas résulter de la seule poursuite du contrat dans ses nouvelles fonctions .

Mais comme l’employeur n’a pas envie de s’engager à promouvoir le salarié, il ne procède pas à cet avenant qui permet pourtant au salarié de revendiquer ses droits et de le protéger.

L’employeur osera-t-il sanctionner le salarié s’il n’arrive pas à exécuter ses nouvelles missions ?

La santé du salarié en danger

Cette promesse d’évolution en augmentant les tâches du salarié n’est pas sans conséquence sur la santé.

Temporairement, le salarié va supporter cet accroissement d’activité. Il va dans un premier temps mettre toute son énergie à prouver à l’entreprise qu’il est digne des nouvelles missions confiées. Il n’hésitera pas à faire des heures supplémentaires (non rémunérées) pour être à jour dans son travail. Il sera fatigué, mais continuera puisque pour lui cette situation n’est que temporaire car il devrait avoir sa promotion fonctionnelle rapidement, une fois fait ses preuves. Bref, il cherche à tout prix à briller aux yeux de son employeur…

Le temporaire durant, puisque l’entreprise n’a pas l’intention de faire évoluer le salarié, la fatigue temporaire s’installe et devient un épuisement chronique. L’épuisement qui poussera le salarié à s’arrêter et à expliquer par la suite à son employeur que le cumul de tâches a conduit à cet épuisement professionnel.

L’employeur saisira ce motif pour justifier l’absence de promotion du salarié. Et comme il doit protéger le salarié en tant qu’employeur, il procédera au retrait des tâches supplémentaires pour les octroyer à un autre salarié…

Le quiet-hiring à la Matmut

Comme de nombreuses entreprises, la Matmut a compris l’intérêt du quiet-hiring à savoir comment faire des économies d’un salaire en répartissant les tâches sur d’autres personnes.

Parfois, en agence, lors du départ du directeur d’agence, les tâches sont répartis entre les conseillers voir quelques fois, exclusivement au CEA3. Le Directeur sera recruté à l’externe et formé par les conseillers de l’agence…

Pire, sous couvert de la montée en compétence du “collaborateur”, il est demandé au conseiller en assurance de préparer les tempos (tâche qui appartient au Directeur d’agence) sans pour autant lui allouer du temps pour préparer ce travail supplémentaire.

La leçon à en tirer…

Il est à déplorer que le Quiet-Hiring est un outil à la main de l’employeur servant exclusivement à réaliser des économies en termes de masse salariale au détriment de la reconnaissance du salarié qui s’est investi, qui a voulu montrer à son employeur qu’il était digne de la confiance accordée… Ce manque de reconnaissance va conduire à la déception du salarié et à son désengagement, voire à son départ de l’entreprise…

Salariés, collègues, ayez le bon réflex : on vous propose des responsabilités supplémentaires ? Exigez un avenant qui précisera les modalités d’exécution des nouvelles responsabilités… et l’augmentation de salaire qui va avec !